Traditions familiales : savoir d’où l’on vient

Pour les Rendez-vous de la Francophonie 2022


Comme le dit le proverbe, « Pour savoir où l’on va, il faut savoir d’où l’on vient ».

Des traditions, il y en a dans toutes les familles! Prenez un instant pour y réfléchir… Organisez-vous des célébrations spéciales à des dates importantes ? Préparez-vous toujours le même repas à un même moment de l’année? Vos ancêtres sont peut-être à l’origine de certains moments magiques de votre vie sans que vous en ayez encore pris conscience. Le proverbe ci-dessus est fort. « Savoir d’où l’on vient. » Le savons-nous vraiment ? Le thème des Rendez-vous de la Francophonie se prête particulièrement bien à une réflexion sur nos origines et sur ce que les générations passées ont bâti pour nous. Que vous soyez Autochtone, nouvel arrivant, francophile, Québécois ou Franco-Albertain, peu importe qui vous êtes, rappelez-vous d’où vous venez.

Nous vous présentons ci-dessous différentes traditions familiales qui vous feront peut-être penser aux vôtres ou qui pourraient vous en inspirer de nouvelles.

Bonne découverte!

Des jeunes nous parlent de traditions

La Fédération de la jeunesse canadienne-française a demandé à des jeunes de son réseau de parler de traditions qui leur ont été transmises par leur famille, qui leur sont particulièrement précieuses et qu’ils ou elles souhaitent conserver le plus longtemps possible.

Du Nouveau-Brunswick, Simon Thériault nous partage sa tradition familiale des Fêtes :

« Depuis près de vingt ans, une grande fête est organisée avec la famille de ma grand-mère maternelle le 26 décembre. Pour l’occasion, nous sommes environ 35 à 40 personnes et nous organisons un tournoi de Roi, un jeu de cartes très connu dans ma famille. Joué en équipe de deux, ce jeu vise à amasser le plus de points pour son équipe pour réaliser son pari ou pour empêcher l’autre équipe de le réaliser. Il faut jouer quelques parties pour espérer se rendre en demi-finale et en finale. L’équipe gagnante du tournoi reçoit un petit trophée et son nom est gravé sur une plaque afin d’en garder un souvenir. Malgré que ce tournoi soit pour le plaisir, il suscite chez certains et certaines de nombreuses émotions puisque tout le monde se prend au jeu et devient compétitif.

Pour le repas, nous partageons ensemble un bon cipâte fait à la maison. Ce dernier est un mélange de bœuf, de porc, de poulet et de pommes de terre, le tout enrobé dans une pâte à tarte et cuit dans une grande rôtissoire. Nous servons le repas avec des petits pains frais faits sur place et une salade de chou. Cet événement permet de voir des membres de notre famille que nous voyons peu, en plus de célébrer le temps des fêtes ensemble. Bien que la tradition ait été mise sur pause pour des raisons évidentes, nous espérons pouvoir reprendre celle-ci lorsqu’il sera sécuritaire de le faire. »

Dans la famille de Janie Moyen, en Saskatchewan, la plus forte des traditions est certainement celle du réveillon, le 24 décembre, à la veille de Noël. Comme de nombreuses familles, les Moyen se réunissent habituellement à la messe de minuit et poursuivent les festivités à Zenon Park jusqu’à tard en soirée! C’est bien entourée que la famille Moyen, répartie entre la table « des grands » et celle des « petits », dévore les nombreux repas préparés par la grand-mère de Janie. Tous les classiques canadiens s’y retrouvent, de la tourtière au ragoût, en passant par la chicken mousse, les patates pilées, la dinde, la farce et les « fameux » carrés aux dates de grand-mère. La famille Moyen a aussi sa recette familiale de moonshine, qui se déguste en famille (réservée aux grandes personnes cette fois) et qui détonne un tant soit peu avec les habits chics de la parenté qui revient de l’église. Animée par les calories et le plaisir de se retrouver ensemble, la soirée se termine tard, ou tôt, c’est selon, et on se quitte d’un « À la prochaine y’all! ». Synonyme de bonheur, de joie… et d’indigestion occasionnelle, le réveillon des Moyen ne donne pas sa place, et la famille attend sagement le retour des rassemblements sécuritaires pour organiser à nouveau cette coutume tant aimée.

Histoires d’immigration

Même si un individu se déplace ou déménage ailleurs, ses traditions et ses origines restent ancrées en lui. Voici des extraits de textes tirés du recueil Histoire d’immigration.

Extrait du texte « Petite-fille indienne » de Mélina Bouchard

Ma grand-mère maternelle n’était pas comme celles de mes camarades de classe, célèbres pour leurs tourtières à la dinde et leurs carrés aux dattes. Elle en connaissait peu en tricot, en cannage et encore moins sur les techniques pratiques pour nourrir une tablée de douze enfants. Oui, Seeta avait d’autres talents.

Elle partageait un langage culinaire bien particulier : le riz basmati trempé, la coriandre fraîchement coupée, l’ail et le gingembre émincés. Son garde-manger était composé d’une impressionnante collection d’épices aux couleurs chaudes et à la texture poudreuse. Le mortier et le pilon toujours sur le comptoir, à ne jamais déplacer sans sa permission. […]

Le curcuma, la cannelle, le cumin, la cardamome, la poudre de cari, le safran. « Attention, ces épices tachent. Prends mon tablier. » Elle m’invite à découvrir un nouveau monde, son monde.

[…]

Même à ce jour, quand l’insomnie me prend, je ferme les yeux et vois grand-mère me border au lit. Elle tire les couvertures jusqu’à mon menton. C’est habituellement à ce moment-là que les enfants s’impatientent pour qu’on leur raconte un conte de Charles Perrault. Pas moi. « Mami, s’il te plaît, raconte-moi l’histoire de Ganesh. » Seeta ne m’a jamais refusé ce caprice, émue de partager avec moi cet aspect de sa religion. Lovée contre son corps, je hume son odeur et écoute avec gourmandise mon conte favori.

Née à Victoria, en Colombie-Britannique, Mélina Bouchard est une fière Franco-Ontarienne d’adoption depuis presque dix ans.

Les traditions familiales peuvent aussi se vivre dans notre comportement, notre façon de voir la vie.

Extrait du texte « Le Canada, un rêve », d’Arrlan Bélizaire

À force d’entendre les récits des voyages fabuleux de mes compatriotes ayant vécu en ce lieu, je rêvais les yeux ouverts. Tout compte fait, je finis par croire que le Canada était le pays où les droits humains étaient les plus respectés. J’en arrivai même à conclure qu’il y faisait bon vivre.

[…] En 2003, cette occasion me fut offerte. […] Le jour de notre atterrissage à Montréal, notre aînée célébrait son 18e anniversaire, sa cadette avait 16 ans, et notre benjamine, 7 ans. L’officier de l’immigration fit ce constat :

— Vous avez neuf bagages, n’est-ce pas ? »

Je me suis tu, car le dixième était imperceptible. S’il regardait bien, l’inspecteur y découvrirait du papier, des tableaux de nature, des plages, du soleil en miettes, des déboires, de l’espoir… et, au fond, le rêve qui y sommeillait.

L’officier poursuivit :

— Qui êtes-vous ? D’où venez-vous ?

Je répondis avec fierté, mais sans arrogance :

— Descendants d’une lignée royale, nous venons d’un pays où vivent des hommes fiers et libres. Nos arrière-grands-parents ont vu le jour au pied de la Citadelle Laferrière, œuvre monumentale du roi Henri Christophe. Nous avons vécu à l’ombre des palmiers et des cocotiers, aussi avons-nous les poumons gonflés de rêves et de liberté. Ce visionnaire nous a légué un héritage de faiseurs d’hommes, de civilisateurs. C’est pourquoi, partout où nous passons, nous cultivons le goût de former des hommes, de fonder une cité… et même d’ériger un fort.

À ces mots, notre agent, fatigué et surpris d’un tel témoignage, a vite fait de passer en revue nos documents. Il a souri, puis nous a laissés partir. Depuis, ce sermon tient lieu de serment. J’étais obligé d’accrocher mon rêve à un point d’ancrage solide.

Arrlan Bélizaire, originaire d’Haïti et doctorant en philosophie au Collège universitaire dominicain d’Ottawa, est établi au Canada depuis 2003.

Nos traditions, nos origines se reflètent souvent dans la nourriture et les accessoires de cuisine qui font notre fierté identitaire.

Extrait du texte « À la recherche du tajine perdu » 

« Au début, ça lui avait à peine effleuré l’esprit. Une chose à faire parmi tant d’autres, et certainement pas la plus importante.

Le froid pointait le bout de son nez, et il fallait s’équiper pour y survivre. Ce premier hiver canadien, on lui en avait brossé un tel portrait avant son arrivée qu’elle se sentait comme un David partant à la rencontre d’un Goliath de glace. Manteau, bottes, bonnet et gants, Zaina était parée.

La saison infernale s’était terminée, et la question s’était de nouveau posée : « Où trouver un tajine? » Comme une voleuse, elle se faufilait dans ses pensées, sans décence ni bonnes manières. Elle gesticulait, tapait du pied à toute heure. C’en devint presque une obsession pour Zaina, qui finit par se mettre en quête du trésor à Ottawa.

— Mais, c’est quoi ce tajine dont tu nous rebats les oreilles depuis des semaines? lui demanda M.

— À t’entendre, on croirait que c’est le Saint Graal! renchérit C.

Cela aurait aussi bien pu l’être, songea Zaina. Sans lui, elle désespérait de ne pouvoir recréer tous les plats traditionnels, toutes les saveurs de son pays qui lui manquaient. À la fois mets et récipient, le tajine, dans toutes ses déclinaisons, colorait les souvenirs de Zaina. Mais où chercher? Et à qui s’adresser quand on vient d’arriver, qu’on n’a pour compagnie que deux valises pleines des rêves de sa nouvelle vie et des miettes du pays qu’on a quitté?

[…]

Zaina ne voulut cependant pas abandonner ses recherches. E. lui demanda pourquoi cela lui tenait autant à cœur. Après tout, elle pouvait très bien préparer ses plats favoris dans un fait-tout. Zaina s’interrogea. Pourquoi était-ce aussi important de trouver ce trésor perdu? Elle réalisa alors qu’elle se sentait déracinée. Elle avait, certes, choisi de partir. Mais elle vivait cette séparation comme un exil, coupée d’une communauté enchevêtrée, tout en essayant d’exister dans la nouvelle. Le tajine, cette invitation au partage, devint le symbole de son désir d’appartenance, l’antithèse de l’isolation. Une madeleine de Proust au parfum maghrébin, qu’elle cherchait à retrouver dans son pays d’adoption. »

Zineb Lemkhanat est née au Maroc et y a grandi. Elle a émigré au Canada en 2018 et s’est installée à Ottawa


Publié en octobre 2021 par les Éditions David, le recueil Histoires d’immigration est le résultat d’un concours d’écriture invitant les nouveaux arrivants, les personnes issues de l’immigration, comme les gens de la communauté d’accueil, à partager leur expérience liée à l’immigration.


Le Corridor vous présente quelques traditions familiales du Canada

Les attraits touristiques nés d’une tradition familiale ont quelque chose de bien particulier. Ils sont empreints d’histoire, de fierté, de passion, d’émotion et de complicité. Plusieurs entreprises faisant partie du répertoire du Corridor Canada transmettent leurs savoir-faire de génération en génération.

Des familles passionnées en Acadie

Le Verger Belliveau est un producteur et fournisseur de pommes de premier plan au Canada atlantique. Lieu zen créé par une famille pour les familles, le verger voit le jour grâce à l’amour d’un Néo-Brunswickois pour sa terre natale. À son retour à Memramcook, en Acadie, vers 1932, Sébastien Bourgeois voit la pomiculture comme une occasion de mettre en valeur ses terres fertiles et de démarrer une exploitation agricole. En plus de créer des emplois, l’entrepreneur permet à la population de se ravitailler en pommes chaque année! Depuis maintenant plus de 80 ans, les descendants de M. Bourgeois lui font toujours honneur.

Recyclage, ingéniosité et nature. Voilà trois éléments qui ont inspiré le concepteur des Maisons de bouteilles, une attraction inusitée à l’Île-du-Prince-Édouard! De 1980 à 1984, Édouard T. Arsenault a construit trois bâtiments (une maison, une taverne et une chapelle) en utilisant comme matériau principal des bouteilles de formats et de couleurs variés. Le recycleur avant-gardiste a lancé son projet après avoir reçu des cartes postales de sa fille Réjeanne, en voyage en Colombie-Britannique. On pouvait y apercevoir une attraction touristique faite en bouteilles sur l’île de Vancouver. Aujourd’hui, le site féérique du Cap-Egmont est exploité par la fille d’Édouard.

Des fermes familiales à découvrir en Ontario

Dans le Nord de l’Ontario, à Sturgeon Falls, se trouve l’entreprise familiale Leisure Farms. En affaires depuis les années 1980, la ferme en est déjà à sa troisième génération dans la même famille. Le souhait des propriétaires actuels est évidemment de poursuivre cette tradition familiale pour plusieurs générations. Ayant commencé par la production de fraises, l’exploitation agricole a multiplié son offre au fil des ans et elle propose désormais de nombreux fruits et légumes ainsi que des céréales. La ferme Leisure Farms est reconnue comme étant l’une des plus grandes fermes d’autocueillette en Ontario. Tout le monde est bienvenu à la ferme, particulièrement les familles, que ce soit pour une visite ou pour prendre part aux activités proposées durant l’année.

La Ferme Drouin n’est pas uniquement une entreprise dirigée par une famille. Elle met littéralement les familles au cœur de ses activités en poursuivant des traditions qui se perpétuent de génération en génération. C’est à Casselman, dans l’Est ontarien, que la ferme a été mise sur pied à la fin du 19e siècle. Au départ, cette exploitation agricole appartenait à Gilbert Pierre, le propriétaire du premier lopin de terre. C’est lors du mariage de la petite-fille de Gilbert à Eugène Drouin que l’entreprise est devenue la Ferme Drouin et que le jeune couple en a pris les rênes. Plusieurs années plus tard, en 1960, leur fils Roland a pris la relève. Depuis ce temps, cinq générations se sont succédé à la tête de cette ferme familiale, où les maîtres mots sont relaxation, sécurité et plaisir. Il s’agit certainement de l’endroit idéal pour observer des animaux, se promener en charrette, déguster un buffet de cabane à sucre, camper en pleine nature, organiser une réception avec service de traiteur, célébrer une fête et même s’éclater dans un parc d’amusement!

Le « paradis » de l’Ouest canadien

Quelque part dans la vallée fluviale de Watino, dans le Nord de l’Alberta, la famille Paradis se passionne pour un insecte particulier : l’abeille. Il n’est pas étonnant que Danny Paradis, issu d’une longue lignée d’apiculteurs, ait choisi de travailler dans le domaine apicole. Cette passion se traduit par l’achat, avec sa conjointe Ginette, de l’exploitation apicole de son père, que le couple nomme Paradis Valley Honey. L’entreprise familiale multigénérationnelle se spécialise dans les super aliments crus provenant directement de la ruche. Elle privilégie des méthodes traditionnelles et durables pour fabriquer ses produits. Chez Paradis Valley Honey, les visiteurs sont bien accueillis! Ils sont invités à venir au Valley Bee Café pour déguster une boisson accompagnée d’une spécialité comme collation, tout en observant le travail des abeilles par les fenêtres.

En juin 2021, l’entreprise est officiellement devenue un ÉCONOMUSÉE® de la Société du réseau ÉCONOMUSÉE® (SRÉ) de l’Alberta. La SRÉ est un organisme international à but non lucratif qui travaille avec un réseau de partenaires ayant en commun les mêmes objectifs, soit la préservation, la perpétuation et la promotion de certains éléments du patrimoine immatériel tels que des connaissances et les savoir-faire transmis de génération en génération.